La pollution de l’air intérieur par le formaldéhyde est un problème de santé public majeur. En 2008, 9 millions de décès dans le monde sont associés à l’exposition prolongée à cette molécule et on estime aujourd’hui que 25-30% de la population y est sujet à allergie. Classé comme substance cancérigène pour l’Homme en 2004 par le Centre international de recherche sur le cancer, il devient depuis lors indispensable de pouvoir surveiller efficacement son niveau dans les espaces clos pour aider à mettre au point des solutions pour réduire sa concentration dans l’air et maîtriser son impact sur les populations. C’est dans ce contexte que les chercheurs de l’ICPEES et de l’ICS, membres du Carnot MICA, se sont associés dans le cadre du projet GMG2, pour proposer un dispositif original et quelque peu révolutionnaire de calibrage d’appareil de mesure du formaldéhyde dans l’air grâce à un dispositif compact et robuste dans le temps dont sa portabilité facilite sa mise en œuvre.
Le formaldéhyde est une molécule complexe car très instable. Il n’existe pas en phase gazeuse en cylindre à des teneurs faibles, d’où la nécessité de le générer. L’objectif des chercheurs était de proposer un dispositif de génération de gaz à bas débit ne nécessitant qu’une petite bouteille de gaz pesant moins de 1 kg pour être facilement transportable, une solution inexistante sur le marché.
Dans un premier temps, les équipes de recherche ont opté pour un système microfluidique permettant la génération de microgouttelettes chargées de formaldéhyde de façon stable et répétable pour les évaporer et les homogénéiser dans le mélange gazeux qui serait ensuite envoyé dans l’analyseur de formaldéhyde. Sauf que le formaldéhyde à tendance à polymériser au contact de l’eau. Des problèmes d’obstruction de la tête d’impression ont alors très vite émergé.
Une innovation originale et révolutionnaire pour mesurer le formaldéhyde dans l’air
Les chercheurs ont alors l’idée de changer drastiquement de procédé. Ils ont développé un système comprenant un récipient contenant la solution liquide de formaldéhyde qui est traversé par un tube dans lequel passe de l’air. La diffusion des molécules de formaldéhyde de la solution vers le gaz, via une petite partie microporeuse conçue par impression 3D, permet d’enrichir le flux d’air en formaldéhyde gazeux. L’innovation est majeure : grâce à la maîtrise de la longueur et la position de la partie microporeuse dans le dispositif, la maîtrise de la température de la solution et de la concentration de formaldéhyde dans la solution, les chercheurs proposent un dispositif stable, durable dans le temps, et cela à très bas débit gazeux ce qui est donc compatible avec une utilisation sur le terrain.
Les résultats sont très prometteurs : la stabilité de la concentration en formaldéhyde du mélange gazeux en sortie du dispositif est excellente, à trois débits différents. Le dispositif peut générer des concentrations de formaldéhyde de quelques microgrammes/m3 à plus de 1000 microgrammes/m3, pour calibrer à la fois des appareils dédiés à la mesure de l’air intérieur, extérieur ou encore aux expositions professionnelles individuelles.
Un effet de levier important
Ce projet a eu un effet levier important, présentant un grand intérêt par rapport aux solutions actuelles. En collaboration avec la société Chromatotec, de nouvelles versions de ce générateur encore plus performantes ont été récemment implémentés à l’ICPEES pour de multiples applications. La génération de formaldéhyde à des teneurs parfaitement contrôlées a permis d’accompagner le développement d’un nouvel analyseur de formaldéhyde extrêmement sensible pour la mesure en continue de ce polluant (LABCOM anaVOC). Ce même générateur permet également de contrôler l’humidité relative d’un mélange gazeux pour approcher au plus près des conditions réelles. La génération de formaldéhyde dans de l’air humide a mis en évidence que certains analyseurs de formaldéhyde pouvaient être impactés par la présence d’humidité, ce qui n’est quasiment jamais étudié. Le générateur est aussi utilisé pour la réalisation de mélanges complexes comprenant quelques COV à des humidités contrôlées. Aujourd’hui les travaux se poursuivent et visent aussi à étudier l’adsorption et la captation du formaldéhyde et d’autres polluants gazeux de l’air intérieur par des matériaux dépolluants.
Dans le futur, les chercheurs ambitionnent de générer prochainement des mélanges encore plus complexes et réalistes avec de nombreux composés organiques volatils et semi-volatils et aussi proposer une solution durable pour la dépollution de l’air intérieur.
Les faits marquants liés au projet GMG2 :
- 1 brevet français étendu à l’international déposé,
- 2 publications à fort impact,
- 2 thèses dont 1 co-financée par le projet,
- 1 laboratoire commun (Labcom anaVOC) avec Chromatotec, leader dans la fabrication d’analyseur d’air.
