Imaginer les premiers mécanismes et développements pour la création d’un pansement connecté, c’est tout l’enjeu du projet Biosensdress, financé par l’Institut Carnot MICA, qui vient de s’achever. Ces découvertes pourraient révolutionner la prise en charge de patients avec des plaies lourdes nécessitant un suivi long, comme celles de grands brûlés. L’idée est de pouvoir suivre de façon précise la guérison des plaies tout en limitant le renouvellement des pansements sur la plaie.
Association de deux compétences fortes
En 2019, Anne Hébraud et Fouzia Boulmedais, chercheuses à l’ICPEES* et à l’ICS*, ont l’idée d’associer leurs compétences, respectivement dans la conception de membranes par electrospinning nanofibreuses à base de polymères biocompatibles et/ou biodégradables et dans l’élaboration de biocapteurs électrochimiques. Le but : créer un pansement « connecté » qui réagirait avec le milieu biologique évoluant de la plaie pour donner des informations en temps réel de la bonne guérison de celle-ci.
Du côté de l’ICPEES, la technologie de création de membranes nanofibreuses par electrospinning est intéressante, puisqu’elle permet d’avoir un pansement avec des fibres dont le diamètre varie de la dizaine à la centaine de nanomètres et des pores inférieurs au micromètre. Une très bonne barrière contre les micro-organismes, tout en laissant passer les gaz pour laisser respirer la plaie.
Du côté de l’ICS, c’est la forte expertise en développement de biocapteurs électrochimiques qui est utilisée, pour donner au pansement la fonction attendue de mesure de l’évolution de l’état de la plaie sous le pansement, par l’analyse et le dosage des molécules ciblées.
L’importance du glucose et du pH
Dans ce projet, les chercheuses se sont intéressées au dosage du glucose et à la mesure du pH. Le glucose est un métabolite suivi avec attention chez les personnes diabétiques. Il se trouve que le taux de glucose d’une plaie joue un rôle important pour sa cicatrisation. En effet, un taux de glucose faible est la signature d’une plaie qui a du mal à cicatriser. D’autre part, le suivi du pH permet également de suivre le processus de cicatrisation de la plaie. Une fois la molécule ciblée, l’équipe de Fouzia Boulmedais a réussi le développement d’un biocapteur composé de nanoparticules d’or réticulées à la surface pour accrocher une enzyme, la glucose oxydase, qui a la particularité d’interagir avec le glucose. Ce détecteur enzymatique permet donc de mesurer la quantité de glucose sur la plaie.
Il ne restait plus qu’à développer ensuite le circuit électrique, biocompatible et souple, permettant de transporter les électrons produits par l’interaction entre la glucose oxydase et le glucose. Ces électrons collectés par le circuit permettent de mesurer la quantité de glucose de la plaie. Pour se faire, l’équipe d’Anne Hébraud a eu l’idée de recouvrir les membranes nanofibreuses de polyuréthane par des feuillets de graphène. Ces matériaux carbonés permettent de rendre les fibres des membranes conductrices.
*Institut de chimie et procédés pour l’énergie, l’environnement et la santé : ICPEES
*Institut Charles Sadron : ICS