Optimiser les protocoles de tests de molécules
Élaboration de nouveaux médicaments
L’industrie pharmaceutique effectue des batteries de tests lorsqu’elle identifie une biomolécule impliquée dans le développement d’une pathologie connue. L’objectif est de trouver une molécule chimique qui pourra la soigner/neutraliser. Parmi ces tests, le « criblage » à haut débit consiste à étudier l’interaction entre la biomolécule responsable et des millions de molécules chimiques répertoriées dans une « chimiothèque ». Le but est de détecter par exemple celles d’entre elles qui pourraient être candidates dans l’élaboration d’un nouveau médicament.
Les campagnes de criblage sont réalisées à « haut débit », c’est-à-dire, par des robots qui manipulent des dizaines de microplaques. Chacune comporte des centaines de réservoirs qui contiennent quelques microlitres de solution. C’est elle qui associe la biomolécule à tester et une molécule de la chimiothèque. Pour prouver qu’une interaction existe entre les deux molécules, les robots mesurent le plus souvent une émission de lumière par la solution contenue dans chacun des réservoirs. C’est ce qu’on appelle aussi intensité de fluorescence.
Une nouvelle méthode plus fiable
Alors que cette technique de tests est aujourd’hui validée et largement utilisée dans l’industrie pharmaceutique, les chercheurs de l’IPCMS, membre de MICA, ont réussi à mettre en œuvre une autre méthode, plus fiable. Plutôt que de mesurer l’intensité de fluorescence, ils ont choisi de mesurer la durée de vie de la fluorescence. L’intérêt principal de cette méthode est qu’elle lève le problème de l’incertitude de la concentration dans la solution.
La mesure de la durée de vie de fluorescence va prouver l’interaction, indépendamment d’une variation de concentration de molécule dans les différentes solutions à tester. La mesure de l’intensité de fluorescence entraîne de nombreux faux positifs ou faux négatifs lorsque les concentrations de molécules sont mal contrôlées. Par exemple, les molécules exprimées par des cellules pour des tests « in cellulo ». Cette nouvelle méthode plus fiable réduira ces taux d’erreurs. Le bénéfice : un nombre de criblages successifs limité, donc un gain de temps et des coûts logiquement réduits pour ces campagnes de criblage qui peuvent durer des mois.
Le protoype
La méthode fonctionne, et pourtant, son développement dans l’industrie pharmaceutique reste à faire. L’efficacité et la sensibilité de la mesure de la durée de vie n’est plus à prouver. Mais il reste à démontrer que la vitesse d’acquisition est comparable à la méthode actuelle, plus simple à mettre en œuvre. Pour arriver et même dépasser les cadences des criblages classiques, les chercheurs de l’IPCMS ont développé un prototype. Il mélange micro fluidique et microélectronique. Une fois placées dans des puces micro fluidiques, on observe la production de microgoutlettes de manière efficace . De plus, chacune constitue un réservoir environ 10000 fois plus petit qu’un micro puits. Ces microgouttes peuvent par exemple être manipulées dans les puces micro fluidiques à des débits bien plus élevés que les plaques de micro puits. Un transfert sur les lignes de tests actuels serait largement envisageable.
Le dispositif de mesure de durée de vie de fluorescence est totalement adapté pour l’intégration et la production industrielle. Cela est possible grâce aux avancées technologiques en microélectronique. On remarque une réduction du coût de production.
La possibilité de remplacer une mesure d’intensité par une mesure de durée de vie de fluorescence, dans des conditions de débits très élevés et avec une sensibilité maximale, devrait amener l’industrie pharmaceutiques à créer de nouveaux protocoles biochimiques de tests de molécules. Ces protocoles permettront par exemple de tester les interactions moléculaires directement dans les cellules. Avec un objectif de développer plus efficacement les médicaments de demain.